Un article de l'express qui explique bien ce qui se passe à Béthune. L'article est long mais près précis.
SOS MoDem ! Epreuve de vérité pour Bayrou
A travers plusieurs articles intéressants et des forums riches en réflexions, Agoravox vient de donner aux débats internes au Modem un relief nouveau qui peut être salutaire. Car une chose est incontestable : le MoDem tout neuf connaît sa première crise existentielles avant même de naître. Pas seulement à cause des municipales mais en raison des ambiguïtés de son accouchement qui ne se fait pas sans douleur
Pourquoi ? Parce que François Bayrou n’a pas pu (ou su) adapter ses actes à son discours. Parce qu’il n’a pas pu (ou su) se libérer complètement de ce qui l’a pourtant poussé à transformer l’Udf en parti du « penser libre » d’abord et du mouvement démocrate ensuite.
Une accusation grave ? Non : un constat plus qu’attristant. Mais sans doute le co-fondateur (avec Corinne Lepage) du MoDem, est-il le premier à en avoir pris conscience. C’est ce qui autorise (encore) celles et ceux qui ont cru (et croient encore) aux vertus du « premier parti du XXI ième siècle » à ne pas baisser les bras et à ne pas « jeter le bébé avec l’eau du bain ».
Trois constats d’abord :
1) François Bayrou ne doit son succès de la campagne présidentielle qu’à lui-même et qu’à la qualité de son programme. Je fais partie de ceux qui pensent que son résultat aurait été meilleur si plus de responsables de structures départementales et locales de l’udf avaient davantage cru en sa victoire.
Ces « strapontins de la droite » (j’ai constaté cela très concrètement sur le terrain en Alsace, et plus particulièrement à Strasbourg) ont été militants par devoir plus que par convictions... en pensant déjà à d’autres échéances, où les notables et candidats notables font des calculs politiciens plus personnels que collectifs. C’est humain.
Celles et ceux qui soutenaient Bayrou à fond, par partage de convictions et non par ambitions, en ont même soufferts. Et en souffrent encore. La sincérité, en politique, est suspecte aux yeux de celles et de ceux qui n’ont que des sincérités successives, simultanées ou simulées.
Faire de la politique « autrement », c’est d’abord repenser, à tous les niveaux, les relations que les « politiques » entretiennent avec le pouvoir… La réussite de Bayrou dépend d’une révolution culturelle qui n’est pas encore faite. Pour être clair, en l’état, « Cap 21 » est plus authentiquement dans la « ligne Bayrou » que l’udf. C’est bien pour Cap 21, mais c’est très triste pour l’udf…
2) Dans sa vie privée, Bayrou (qui heureusement ne cède pas à la mode détestable de la pipolisation) est le seul des trois grands candidats à la Présidentielle à être sorti indemne de cette terrible épreuve. Mais politiquement, il est trois fois le grand cocu de l’Histoire
>>>Il aurait dû accéder au second tour sans cet étau politico-médiatique des fanatiques, de droite et de gauche, de la bipolarisation, si artificielle et si nocive… Ah ! Avec des si…
>>>Il a été lâché, ou plutôt trahi, par ses lieutenants qui se retrouvent aujourd’hui dans un Nouveau centre qui n’est ni nouveau ni centriste mais qui constitue un pôle risquant de perpétuer longtemps cette bipolarisation dénoncée, les marais à girouettes et l’art du « compromis-compromission ».
Ce pôle, de surcroît, encourage les sénateurs udf à rester plus udf que modem… Avec tous les considérations financières que cela comporte. Or, un parti n’est INDEPENDANT que s’il est financièrement autonome. Le « nerf de la guerre » est aussi le muscle de la paix. Personne n’en parle beaucoup, mais ce n’est pas un hasard si Mercier, à Lyon, est si écouté : on n’est pas trésorier du groupe sénatorial sans moyens de pression.
>>>Les débauchages qualifiés d’ « ouverture » pratiqués avec talent par Sarkozy visent en fait plus le Modem en herbe que le PS en friches. Les « socialistes » recrutés étaient (presque) tous prêts à rejoindre Bayrou ou travaillaient déjà avec lui. C’est un fait qui n’a guère été mis en relief par les commentateurs politique à la vision binaire…
3) La chance et le mérite de François Bayrou sont fantastiques : un tel d’élan populaire, autant d’adhésions virtuelles puis réelles, autant de militants potentiels. Du jamais vu en temps de paix ! Une vraie occasion historique.
Mais cette chance et ce mérite ont leurs revers. Un parti, ce doit être structuré. Avec tout ce que cela comporte. Et un nouveau mouvement intéresse d’une façon perverse deux catégories qui se trouvent (temporairement) « alliés objectifs » : les forces de résistance internes et les forces de concupiscence externes.
Les deux adhèrent officiellement à la « ligne » non par conviction, mais par calcul. Là encore, ce constat se nourrit de ce qui observable dans de nombreuses régions sur des sites internet « démocrates » et de ce que je peux observer dans le microcosme strasbourgeois.
C’est drôle, d’un certain point de vue : les plus « archéo-udf » font ouvertement le jeu des plus « néo-modem »…
« Archéo-udf » : c’est l’expression qui convient pour qualifier celles et ceux qui s’accrochent à l’udf en souhaitant … l’échec du moDem. Leur vrai pouvoir, c’est celui de nuire. Et dieu sait qu’ils en abusent…
« Néo-Modem » : c’est le mot qui convient pour désigner celles et ceux qui n’ont soutenu ni Bayrou aux Présidentielles, ni les candidats du Modem pendant les législatives, mais qui trouvent subitement chez les « démocrates » un havre avec des bittes d’amarrages à… leur service.
Evidemment, ils font cela en toute « légitimité démocratique » puisqu’ils tirent parti des onctions qu’ils pensent avoir reçues des « instances parisiennes », voire de Bayrou en personne, et des « responsables » archéo-udf locaux lesquels voient en eux un geste de la providence:ils sont susceptibles de noyer... les espérances du moDem.
Face à ces constats de réalité, François Bayrou qui dit et redit qu’il « ne reviendra pas en arrière » peut avoir un atout décisif : pousser sa logique au bout. Avec courage.
Pour l’heure, les conditions dans lesquelles sont décidées les investitures pour les municipales ne s’inscrivent pas sur ce chemin. Un « fonctionnement curieux » qui , sans rappeler une certaine proximité soviétique, est « prévu en dehors de tout cadre statutaire », note Benjamin Sauzay. " Nous sommes dans le simple fait du prince". Vous avez dit "démocrate"?
Les non-réponses données aux lettres et autres messages envoyés à Bayrou ou aux "instances" ne s’inscrivent pas dans le dessin promis du destin proposé. Il ne suffit pas d’ouvrir des forums : il faut en tenir compte…Vous avez dit "démocrate"?
Que des militants, responsables et éclairés, éprouvent le besoin de faire circuler une pétition simplement pour rappeler le pourquoi de leur adhésion au Mouvement démocrate a valeur d’avertissement pour le dessein même de Bayrou. Vous avez dit "démocrate"?
Que des nouveaux encartés se disent (déjà) prêts à renvoyer leurs cartes orange (j’en connais !) avec une demande de remboursement de leur cotisation pour « publicité mensongère » est beaucoup plus grave que les errements opportunistes d’un Morin qui pour l’heure n’a tiré parti de sa nomination ministérielle que pour illustrer son « degré de Peter »…
Que nombre de sympathisants n’aient pas traduits en une adhésion programmée leur partage des idées de Bayrou est un vrai signal d’alarme : Attention une chance fantastique risque d’être gâchée ! Ni à cause de la droite, ni à cause de la gauche ni à cause de la presse, mais à cause d’une mollesse coupable et de jeux « politichiens » de centreux qui se voudraient « centristes » et d’autocrates qui se voudraient « démocrates ».
Qui parlait de « centrisme couillu » ? Bayrou en personne, il me semble. Allons François, encore un effort. Le plus décisif peut-être. Tout peut être encore gagné. Trop de temps et d’énergie déjà ont été perdus… Mais tout peut être encore être gagné. Le courage, parfois, c’est de savoir surtout faire preuve de bon sens…
Daniel RIOT